Évaluation des compétences

L’évaluation par compétences

Nous réfléchissons et nous faisons évoluer nos pratiques pédagogiques depuis plusieurs années. Au fil du temps, l’évaluation des élèves, qui était une préoccupation périphérique mais source de malaise s’est déplacé vers le cœur de notre réflexion pour en devenir le point clé.

Plusieurs problématiques :

  • Qu’évaluer ?
  • Quand l’évaluer ?
  • Comment l’évaluer ?
  • Comment rendre compte de l’évaluation aux élèves, aux parents ?
  •  

Pour la première « QUOI », la réponse peut être assez simple :

N’est évaluable que ce qui est observable. On évalue donc une production élève que l’on peut toucher, voir, sentir, entendre, goûter : une pièce ou maquette, un document écrit, une prestation orale, un comportement…

Le référentiel de formation nous indique les compétences à évaluer, la situation d’évaluation et les critères de performance. Que demander de plus ?

 

Le protocole d’évaluation va définir la méthode pédagogique employée.

Une compétence est acquise ou ne l’est pas. C’est binaire, donc pas de notes, pas de lettres, pas de couleurs variant du vert au rouge en passant par l’orange. Une croix suffit !

 

Le contrôle en cours de formation est plus approprié à la validation des compétences. Il est pourtant décrié par un certain nombre de collègues qui pensent, assez justement, que cela laisse le champ libre à la notation au petit bonheur la chance et aux dérives pour augmenter le pourcentage de réussite aux examens des établissements puis que chaque enseignant évalue lui-même. Cela relève d’un manque de confiance envers les collègues et peut être envers eux-mêmes. C’est en effet une lourde responsabilité de définir si tel ou tel mérite d’avoir son diplôme ! Seront-ils capable d’évaluer sans se tromper ? Il est évident que des dérives seront présentes. Mais le CCF a l’énorme avantage, pour l’enseignant consciencieux, de permettre une évaluation des compétences de l’élève contrairement à un examen final écrit. Il met tous les candidats sur le même pied d’égalité mais le résultat n’est en aucun cas la validation des compétences de l’élève. C’est un inconvénient majeur !

 

Nous souhaiterions proposer lors de la validation du diplôme par CCF la présentation du dossier élève (son road book) qui représente son chemin de deux ans d’acquisition de compétences associé à un dossier pédagogique fait par l’équipe pédagogique et détaillant les supports, les problématiques, les compétences, les évaluations.

 

Pour que l’élève fasse cette production attendue dans de bonnes conditions (il a le désir de produire ce résultat d’où une mobilisation optimale de ses connaissances et capacités), il doit le faire à partir d’un support motivant (suscitant le désir) et ayant du sens et que cette production soit la réponse à une problématique elle-même motivante et ayant du sens. D’où la mise en place d'une démarche pédagogique de projet.

 

1.        Lecture : rapport de l’Inspection Générale de juin 2007 : les livrets de compétences : nouveaux outils pour l’évaluation des acquis.

L’évaluation des compétences n’est pas nouvelle et expérimentée par Le Québec, la Belgique, la Suisse…

 « La focalisation sur la notion de compétences permet donc de porter une attention accrue aux processus d’apprentissage, à la façon dont l’élève apprend et utilise ses connaissances, et finalement au fonctionnement cognitif des individus. Elle ne disqualifie pas, loin de là, l’absolue nécessité d’ancrer les apprentissages sur l’acquisition rigoureuse, étayée, de connaissances solides sans lesquelles les compétences visées ne seraient que châteaux de sable. Mais elle rappelle l’ardente obligation de donner du sens aux savoirs enseignés à l’école, d’en augmenter la portée au-delà de l’horizon de la seule réussite aux épreuves scolaires, et de mettre au premier rang des missions de l’école la formation de la pensée autonome. ».

 

L’élève n’apprend pas pour être évaluer mais il est évalué pour mieux apprendre. L’évaluation a une dimension formative : elle tient compte des progrès des points forts de l’élève et signale ses points faibles et les moyens de les corriger.

 

L’objectif est de positionner explicitement l’évaluation comme partie prenante, voire centrale, des processus d’apprentissage. Cela dépasse la simple modification des pratiques d’évaluation et représente un profond changement dans les représentations et les pratiques pédagogiques. L’enjeu est donc particulièrement important.

 

2.        Nos propres réflexions :

Nous sommes, en France, très loin de cette conception de l’évaluation ! Il y a un gouffre à franchir.

Il faudra tenir compte et étudier de façon approfondie les réussites et les échecs des courageux pays réformateurs.

 

Comment s’opère des changements de méthodes dans l’industrie (prenons l’exemple de l’ingénierie simultanée chez Renault, création du Technocentre…) ? Cela se fait sur le long terme, passe par une formation pour former et convaincre les acteurs de terrain et aussi passe par une formation des jeunes dès l’école !

 

Le premier endroit où ça doit changer c’est donc à l’IUFM. Le chantier est tellement énorme, la prégnance tellement forte ! Les enseignants sont souvent d’anciens bons élèves à qui l’école, telle qu’elle est aujourd’hui, convenait très bien. Ils sont souvent en souffrance devant l’échec de ce qu’ils mettent en œuvre et qu’ils pensent juste. L’enjeu est de leur faire comprendre qu’un élève normalement constitué ne peut pas être bien à l’école.

 

Extrait d’un article suisse d'André Giordan :

« Apprendre est en soi un processus tellement complexe qu’une seule méthode d’enseignement ne peut en faire le tour. Il faut pouvoir « jongler » avec plusieurs approches, certaines classiques, d’autres qui dépassent les propositions actives (de type constructivistes ou socioconstructivistes pour les spécialistes) comme l’allostérique. Cela est bien connu et reconnu, même si des parents, des enseignants et des ministres s’attachent à rechercher la « bonne méthode », cette éternelle recette miracle !

Toutefois les difficultés qui empêchent l’apprendre ne sont pas principalement à ce niveau… Les obstacles que rencontrent les jeunes sont très en amont. Dans la perte du désir d’apprendre, et notamment dans le peu de sens qu’ils mettent à la scolarité d’une part, dans la perte de confiance dans leurs capacités de réussite d’autre part. Sur ces deux plans, l’école pour toutes sortes de raisons n’est pas innocente. Le plus souvent, elle dépossède l’enfant de l’intérêt pour le savoir et surtout elle le fragilise et le décourage.

Cela est d’autant plus dommageable que le métier d’élève n’est pas facile. Il réunit à lui tout seul presque tous les défauts des divers métiers adultes. Cette « fonction » n'est pas librement choisie. Elle s'exerce sous le regard et le contrôle d'un tiers qui en permanence évalue... Enfin, elle est « pleine » d’implicites… Ceux qui réussissent ont découvert spontanément ce qu’il faut faire et ne pas faire ou l’ont acquis progressivement dans la famille. »

 

C’est particulièrement (voire extrêmement) difficile d’évaluer les compétences. Plus on essayera de faire quelque chose de parfait, de rigoureux plus on risque de retomber dans des travers connus (évaluation ponctuelle). Il ne faut pas que ça devienne une usine à gaz où tout est écrit, tout est défini, il faut accepter un certain flou et quelques approximations pour justement construire les compétences (les travailler) dans de bonnes conditions.

 

L’évaluation des compétences change complètement notre façon d’évaluer et l’objectif c’est que ça change aussi notre pédagogie ! Alors il faut des outils à la hauteur de l’enjeu, des outils design :

Un outil inconnu, qui séduise et surprenne, (innovation) tout en étant immédiatement reconnu (répond à la problématique)

Si l’on essaye de calquer les modèles existants, on court à l’échec.

 

3.        Notre expérience :

Nous nous inscrivons dans la démarche globale initiée par la réflexion sur le « socle commun ». Notre expérience se place au niveau du lycée professionnel pour des sections de BAC PRO et de BTS plus particulièrement. Nous avons fait avec les référentiels existants. Celui du BAC est récent et orienté « compétences ». Celui du BTS ERO l’est nettement moins ! Nous nous appuyons énormément sur le référentiel et le document d’accompagnement du BTS IPM. Ils nous permettent de voir un peu plus loin que le référentiel ERO existant. Disons que nous combinons l’esprit IPM avec le contenu du programme ERO.

 

Nous nous sommes placés dans le cadre d’un référentiel où les compétences sont explicitées ainsi que les situations d’évaluation (données) et les critères de performances. (Ce qui n’est pas tout à fait vrai !)

 

 

a)    Définir le protocole d’évaluation des compétences.

On définit les compétences (et le niveau de compétences) (c’est un peu la différence entre un BAC et un BTS : les compétences sont particulièrement similaires mais le niveau est différent) que doivent avoir atteint au minimum les élèves (pour un semestre ou pour une formation complète (diplôme)). Même celui qui a le plus de difficultés (le plus introverti, le plus hyperactif, bref celui qui a le plus de difficultés…) à partir du moment où il joue le jeu (je suis là et je bosse) doit avoir 14. (ça aussi c’est notre boulot : susciter le désir. Mais des fois avec certain on y arrive pas. L’impuissance apprise s’est transformée en rage et en colère et c’est parfois très difficile à récupérer)

 

On considère qu’une compétence (je devrais dire : le niveau de compétence pour la formation (BEP, BAC ou BTS) est acquise ou pas (pas de demie mesure). Donc on valide par une croix. (Attention on peut avoir une graduation mais elle indique l’augmentation du niveau de compétence et non l’acquisition d’une compétence plus ou moins bien…) donc c’est toujours une vision positive ! On dit pas "tu n’as pas atteins la compétence" mais « tu as atteins ce niveau de compétence »…

 

b)    Définir les situations d’évaluations

On met l’élève en situation (en ce qui nous concerne, c’est son travail sur le projet : situation complexe (voir page 11 du rapport), pleins de données, situations diverses (transversalité)). Et on observe ! Il augmente progressivement, avec notre aide, son niveau de compétence (il monte tout seul la première marche de l’escalier, on l’aide pour atteindre la deuxième, dans une autre situation, il va monter tout seul les deux premières marches et on l’aide à franchir la troisième et ainsi de suite). Et un jour il a monté tout seul le nombre de marche qui correspond au niveau de compétence attendu. Et là il suffit de mettre une croix là ou il faut. (ou de faire évoluer le curseur)

 

Pour nous la mise en situation de validation de la compétence est la même que la mise en situation de travail des compétences.

S’il y a toutes les croix : il a 14 (pour le semestre ou pour le diplôme).

 

La difficulté est de faire un tri, de définir ce « 14 ».

Et on valorise le reste. S’il a un niveau d’une compétence supérieur au niveau demandé, s’il a une compétence qui sort un peu de référentiel (mais qui se rapporte aux compétences du socle commun : facile ! elles s’y reportent toutes plus ou moins ! donc pas de soucis pour en tenir compte !! ),

 

C’est la capacité d’entreprendre : celle du socle commun s’appelle « autonomie et initiative » (7ème) lui permet d’aller de 14 à 20.

Et les savoirs là dedans ?

 

Pour en revenir au risque du trop parfait : définir tout avant pour un souci d’égalité des chances, c’est pervers et dangereux. Cela va rassurer les collègues (peur de mal faire) mais on risque de galvauder el principe d’évaluation des compétences.

 

Nous pensons que les situations d’évaluations sont complexes et diverses et on se rend compte, après coup, qu’un élève a atteint une compétence. Parfois indépendamment de nous ! Ils savent apprendre par eux-mêmes, il faut en tenir compte. Le projet ne serait-il pas la mise en situation la plus proche de ce qui est attendu ? (attention à condition qu’on parle bien de projet pédagogique et non seulement de projet technique : voir § 6.5.2) (on va plus loin que le travail demandé pour l’aboutissement du projet technique en lui-même : rendre visible (formalisation) l’augmentation du niveau de compétence des acteurs)

 

Conclusion : définir un principe et ensuite accompagner les collègues, les rassurer quant à leur capacité à juger, et laisser une certaine marge de liberté. Imposer une justification écrite (un dossier pédagogique construit) de l’évaluation.

Par contre la communication envers les élèves et les parents est particulièrement importante !!!!!

 

Notre évaluation se fait sur deux tableaux :

  • Savoir faire (quantitatif et qualitatif)
  • Savoir être

Et de deux façons :

  • Evaluation formative
  • Evaluation sommative

Des feuilles Excel servent d’appui à cette évaluation. En voilà un exemple en BTS :

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