- L’autoformation : centration sur l’apprenant, avec dans un premier temps introduction de méthodes actives, puis d’individualisation, de personnalisation et de différentiation pédagogique et enfin d’auto-évaluation, d’auto-direction des apprentissages et différentes formes d’autoformation. Le champ conceptuel est celui de la rencontre entre le concept d’autonomie et le domaine de la formation.
- Les formations ouvertes : l’ouverture consiste à diversifier les modes de formations (formation modulaire, formation individualisée, formation à distance, centre de ressources, réseaux réciproques d’échanges de savoirs, campus virtuels..), les médias utilisés (livres, vidéo, enseignement assisté par ordinateur, Multimédia, Internet...), les méthodes (pédagogie par projet, simulation, travail coopératif ...). On passe d’un mono à une proposition multiforme et « ouverte ».
- L’alternance : par ce terme pris dans un sens très large sont désignées les diverses formes d’apprentissages dans un contexte autre que celui de l’unique salle de classe ou de l’amphithéâtre universitaire. Cela inclut des apprentissages informels par les situations de travail ou la vie sociale, mais aussi des formes plus formelles comme les organisations apprenantes ou les Centres de Formation par Apprentissage (CFA), le paramètre important est l’introduction d’un contexte précis qui motive et donne sens à un apprentissage singulier en lien avec l’apprenant et ce contexte.
Ces trois courants vont dans un premier temps interagir deux par deux pour provoquer une première complexification de l’offre de formation.
Nous pensons détenir le lieu et l’équipe qui illustre la réunion très complexe de ces formes, rencontre entre autoformation et alternance qui permettrait « un accompagnement de l’autoformation dans sa triple dimension : sociale, professionnelle et pédagogique » et qui doit favoriser « la production de savoirs et de sens ». Il est évident que les trois méthodes décrites ont été retenues car elles s’inscrivent dans un contexte d’apprentissage que nous défendons et appliquons depuis de nombreuses années dans notre école, mais il serait orgueilleux de notre part de laisser à penser que nous pouvons résoudre les problèmes de l’apprentissage par un coup de baguette magique en regroupant, en partie, ce qui vient d’être sommairement décrit.
Dans l’approche que nous défendons, l’apprenant doit devenir agent de sa formation, il en est auteur, mais cette « quête de savoirs, de compétences et de sens » n’est pas individualiste, ni solitaire, elle est accompagnée et coopérative, c’est pourquoi nous pouvons parler de formation par production(s) de savoirs singuliers contextualisés grâce à un triple accompagnement individuel, coopératif et collectif.
L’élève apporte ses connaissances provenant en premier lieu de ses observations, des relations et notations enregistrées et délimitées dans des problématiques décrites et inscrites et, en second lieu, d'un savoir acquis et enregistré mais inexprimable (tacite) car partie intégrante de sa personnalité. Nous pensons plus précisément dans ce cas à nos élèves en stage, capables d’intervenir ou de prendre en charge des productions à fortes valeurs ajoutées sur des machines à cinq axes et plus.
L’important dans ce modèle est « la problématisation » accompagnée d’une situation externe au centre de formation (usine, atelier) dans laquelle, l’apprenant est impliqué comme praticien ou acteur. Il s’autorise à être « praticien réflexif » ou même « chercheur -praticien ». Ce n’est plus un « opérateur », mais un citoyen qui réfléchit à sa pratique professionnelle, qui « doit » la remettre en cause en recherchant se qui ce fait de mieux et vers « quoi » son métier doit s’orienter.
L’autoformation éducative
Autoformation + Formation ouverte = Formation (Autonomie + Ouverture)
En effet, dans cette opération, les mots emblématiques sont « Autoformation », ou « Formation Ouverte ». La mise en facteur du mot « Formation » provoque l'apparition des termes « Autonomie » (sous-entendu des apprentissages) et « Ouverture » (sous-entendu de l'enseignement).
Si nous mettons le mot « Formation » en avant, c'est pour bien marquer que notre point d'entrée sur le champ de l'autoformation est celui d'une institution éducative, mais les mots « autonomie et ouverture » impliquent des choix pédagogiques précis. L'enjeu est le passage d'un enseignement transmissif centré sur les contenus à une stratégie d'appropriation, voire de construction des savoirs par les apprenants. Nous refusons que les « stagiaires » soient des « objets ». Nous visons au minimum qu'ils soient « sujets ». Mais nous souhaitons qu'ils soient « acteurs », voire même « agents » de leur formation.
Il y a un paradoxe à entrer dans l’autoformation par le mot formation mais ce paradoxe est au cœur de l’autoformation éducative, fruit de la rencontre entre autoformation et formation ouverte :
« L'autoformation éducative » recouvre l'ensemble des pratiques pédagogiques visant explicitement à développer et faciliter les apprentissages autonomes, dans le cadre d'institutions spécifiquement éducatives. Cette conception recouvre le fait d'apprendre dans des dispositifs pédagogiques ouverts. Le terme d'autoformation traduit ici une visée éducative, l'autonomisation des apprenants participant alors du projet pédagogique des formateurs. De nombreux outils et moyens techniques viennent instrumenter la volonté de renouvellement pédagogique qui caractérise ce courant : Ateliers de Pédagogie Personnalisée (APP), centres de ressources, espaces d'autoformation, centres permanents, etc. L'expression "formations ouvertes" a été proposée par la Délégation à la Formation Professionnelle pour, précisément, désigner cette offre de formation flexible, individualisable, propice à l'autoformation accompagnée »
La notion d’autoformation éducative n’est pas caractérisée par apprendre seul sans formateur, mais bien par la notion de dispositifs autonomisation, d’auto direction des apprentissages et d’ouverture maximum de l’offre de formation qui va du cours magistral choisi et demandé à l’autodidactie.
Il y a au moins deux grandes approches différentes qui s'offrent à la personne pour renouveler ses connaissances et sa pratique professionnelle, soit par "consommation d'un savoir" ou par "production d'un savoir". La première approche est largement influencée par le modèle de la science appliquée tandis que la seconde approche repose davantage sur une démarche d'autoformation propre aux caractéristiques d'un adulte apprenant. Nous considérons que la technologie, tout comme la pédagogie, appartient aux Sciences humaines car elle est le fruit sans cesse renouvelé d’une histoire et des hommes. Elle s’inscrit donc bien dans une temporalité.
La formation à visée diplômante, permet un accès sur mesure, diversifié et ouvert à une «consommation de savoirs référencés » requis pour l’obtention du diplôme. Le référentiel est le même que pour les formations classiques, car il est important de garder la même valeur au diplôme quelque soit le mode de formation choisi. L’approche est donc très analytique et repose sur la modularité de la formation et sur un contrôle continu, critère défini en terme de savoirs-faire observables : « être capable de ». Nous « l’observons à la manière de» un responsable de production ou des ressources humaines lors d’une Valorisation des Acquis (VAE) dans l’atelier de notre école.
Cette tendance analytique issue de la pédagogie par objectif des années soixante-dix est atténuée par l’introduction des compétences transversales et des objectifs transversaux, continus, progressifs et disciplinaires, mais l’ensemble de l’offre de formation est de nature analytique et programmatique et préexiste donc presque entièrement à l’arrivée des stagiaires. Par exemple les formations Matière Individualisées ne nécessitent pratiquement pas de création de documents ou de ressources (par les apprenants), celles-ci étant produites (collectivement) en amont par l‘ensemble des formateurs.
L’introduction dans l’alternance, de formation par projet, de formation -action, voir d’action formation -recherche, introduit dans les formations ouvertes la formation par production de savoir ce qui conduit à passer d’une ingénierie plutôt analytique à une ingénierie plutôt (entièrement) constructiviste. Rien n’est préconçu hormis des processus, la fonction d’accompagnement devient centrale.
Nous réfléchissons actuellement sur une modélisation de la rencontre simultanée de l’autoformation, des formations ouvertes et de l’alternance ou plutôt du passage des trois approches, vision d’ensemble mais complexe de la formation. Dans un même dispositif, il s’agit de relier formation par production de savoirs mixant autoformation et alternance, autoformation éducative, intégrant autonomie et ouverture et ingénierie analytique et constructiviste, fruit de la rencontre entre alternance et formation ouverte.
Mais, ce modèle éclate rapidement dès que l’on introduit soit l’autoformation, soit l’alternance soit l’ouverture et à fortiori quand on relie les trois courants.
Tout d’abord « les ressources éducatives matérielles et humaines favorisant l’accès autonome aux savoirs, mais aussi la socialisation et l’ensemble des communications interpersonnelles indispensables aux apprentissages » échappent à l’unicité du lieu et des acteurs symbolisés par la pyramide (un seul savoir, un seul élève, un seul professeur, un seul lieu. C’est plutôt un triangle car 2 dimensions). Dans les exemples donnés précédemment et dans toutes les expériences, le monopole de la définition des savoirs et de leur transmission par le seul professeur est largement battu en brèche. Les ressources éducatives humaines et matérielles sont un pôle à part entière et obligent de passer d’un triangle à une pyramide pédagogique, dont les faces se mettent deux à deux en tension : face autoformation et face formation ; face médiatisation et face médiation.
Cela conduit à deux pistes complémentaires, un pilotage analytique par l’offre (enseignement sur mesure médiatisé) et un pilotage constructiviste par la demande (accompagnement de projet personnel) la complexité englobante consiste à mettre en synergie ces deux pistes :
La première piste consiste à favoriser l’accès autonome aux savoirs savants (ou plus exactement aux savoirs à enseigner référencés), la médiatisation préexiste dans sa totalité, la validation des acquis et des évaluations formatives permettent une individualisation des parcours et éventuellement une différenciation pédagogique, mais le but final est commun à tous et reste défini par les enseignants (ou l’institution de tutelle)
La deuxième piste vise à accompagner le projet individuel ou collectif avec une aide à la construction de savoirs singuliers par l’apprenant, lié à l’acquisition de compétences en situations, pilotés ou au moins demandés par l’apprenant lui même ; les ressources ne sont pas toutes pré-médiatisées ou elles sont apportées en grande partie par l’apprenant lui-même ».
Cette complexité englobante conduit à complexifier les pôles du triangle pédagogique, où les apprenants peuvent être alternativement objet, sujet ou agent de leur formation et les formateurs tour à tour transmetteur, instructeur ou accompagnateur et enfin, le pôle des savoirs se complexifie lui aussi en savoirs à enseigner, en référentiels d’objectifs et en savoirs particuliers (dans leurs contexte) que l’on peut encore complexifier en introduisant les savoirs acquis par expériences et les savoirs tacites (Ils interviennent et sont visibles lors de la validation des acquis de l’expérience).
Une vue de dessus de la pyramide pédagogique
Cette pyramide permet d’analyser la diversité pédagogique nécessaire pour passer d’une approche monolithique de la formation à une approche multiforme, seule garante de la réussite du plus grand nombre. Cette approche reprend le concept des multi qui se décline en multi objectifs, multi niveaux, multimédias, multi modes, multi publics, multi méthodes, multi partenariats, (multidisciplinaire... faut-il garder les pluri pour les échanges ou les transferts purement disciplinaire à caractère pédagogique ?)
Mais, cette modélisation, apparaît maintenant, trop analytique et dichotomique et ne fait pas assez apparaître, les interactions et surtout la temporalité de la formation.
La formation tout au long de la vie dans la société pour une formation durable
Une première complexification porte sur le pôle des ressources éducatives, très influencé par l’approche des dispositifs, nous pensons essentiellement aux ressources éducatives formelles prévues par le dispositif et même si pour nous, une partie importante des ressources étaient cherchées ou crées à la carte en fonction des besoins de l’apprenant, le «formateur facilitateur» des apprentissages restait le scénariste des activités d’apprentissage et de leur accompagnement.
Nous avons largement décrit, dans un autre temps et devant divers publics, qu’à coté des ressources éducatives formelles prescrites et des aides contractualisées dans le dispositif d’orientation de Fontaineroux, de plus en plus d’apprenant « agent de leur propre formation », ne se contentent pas seulement d’autodiriger leurs apprentissages sur le plan cognitif, mais construisent de façon autonome un environnement formatif qui dépasse largement le dispositif institutionnel :
-
il est de plus en plus fréquent qu’ils s’engagent simultanément dans plusieurs dispositifs en jouant sur leurs complémentarités, par exemple enseignement des mathématiques et parcours professionnels, ou formation modulaire (en présence du tuteur) et complément ou soutient à la discipline retenue (les licences OPI).
Nous retrouvons le concept d’hybridation des modes de formations qui va (doit ?) de plus en plus s’imposer :
- Ils utilisent sans prescription du formateur, non seulement les ressources du formateur, mais aussi leurs propres ressources éducatives, anciens cours, sites internet, manuels de préparation aux concours souvent empruntés à la bibliothèque municipale ou dans une médiathèque, et demande de l’aide en cas de blocage. C’est le cas des « bachoteurs », très rares à Fontaineroux mais qui sont une infime constante, surtout chez certains issus d’une classe sociale élevée, les fameux 8 % que l’on rencontre en Lycée professionnel.
Cela, nécessite des formateurs très réactifs et dominant leur discipline pour pouvoir accompagner à chaud la résolution de problèmes inconnus.
- Une deuxième complexification porte sur les finalités de la formation qui par un retour aux sources de l’Education permanente doit relier : employabilité, éducabilité et citoyenneté pour ne pas restreindre la formation à la seule formation professionnelle continue, voir à l’adaptation au poste de travail,
- La troisième correspond à la temporalité qu’il s’agit d’enraciner dans la formation tout au long de la vie et en plagiant le concept de développement durable en intégrant au présent, le passé (rapport au savoir, VAE, ...) et le futur, en particulier en développant dans toutes les formations les compétences clefs pour se former et s’auto former.
Nous revenons, dans cette troisième complexification, à des sujets déjà décrits lors des séminaires et rencontres pédagogiques et qui ont traits à « l’acquisition d’un état d’esprit » des profs et aussi des élèves à «l’Horizon 2019 ».
Écrire commentaire